Sicaires - Epilogue
E P I L O G U E
Bien des années plus tard, Zoe reçut un courrier du consulat de Singapour à Paris lui demandant de passer les voir pour affaire la concernant. Elle appela pour prendre rendez-vous et sut alors qu'il s'agissait du bénéfice d'un testament dont on lui donnerait tous les détails lors de sa visite. Son père dit adoptif lui léguait une partie importante de sa fortune. Rendez-vous fut pris pour le lundi 13 mars rue Murillo à 15 heures 30. On était en 2017. Elle y fut reçue par le premier secrétaire du consulat qui après les civilités d'usage lui lut le testament laissé par son père.
Les avoirs qu'il abandonnait à la vie étaient constitués de fonds déposés dans deux banques. L'une à Singapour, l'autre aux îles Cayman. Le testament disposait qu'ils seraient réparties en trois lots d'égale importance. Le premier allait à sa veuve et serait servi par la Standard Chartered de Singapour. Le second irait à sa fille adoptive présumée dont il indiquait le nom malien, le prénom peul, la date et le lieu de naissance sans aucun extrait de naissance ni certificat d'adoption, et serait servi par la CIBC First Caribbean de George Town. Le troisième tiers était destiné au Chaba Rehab Center de Tel Aviv qui réparait les soldats blessés de Tsahal et d'ailleurs aussi quand ceux-là ne pouvaient accéder à la chirurgie de guerre dans leur propre pays. Les fonds seraient versés par la Standard Chartered de Singapour. Le notaire public qui avait reçu le testament des mains du défunt était formellement mandaté pour exécuter les virements interbancaires nécessaires à la constitution des trois lots et ordonner les remises de fond.
Le premier secrétaire lui conseilla de garder les fonds de la succession aux Iles pour éviter les droits particulièrement élevés en France parce que dans le cas présent, le défunt n'avait pas mentionné la filiation pour des raisons qu'il ignorait mais que le lecteur a parfaitement compris. Zoe prit l'avion en business class pour George Town via Francfort et Toronto afin d'ouvrir un saving account à son nom et faire exécuter le transfert. La banque était au courant et la félicita de son choix. Neuf cent cinquante trois mille et deux cent un dollars US bien garés ! Elle envisageait sérieusement une expatriation sous les alizées. Anak transféra sa part à Djakarta et la convertit en roupies pour remplir sa baignoire. Non, elle en transféra quinze pourcent seulement et laissa le reste dans un compte bloqué à son nom à Singapour. Trois mois plus tard, elle reçu de Tel Aviv un accusé de réception des fonds qui ne mentionnait pas de montant et une lettre de remerciement aux bons soins du notaire public de Singapour.
L'argent du crime était blanchi !
De John, nul n'eut plus de nouvelles, mais au bar corse de la Contrescarpe, il se disait qu'il avait fait l'orpailleur en Guyane un temps et s'était retiré vers Manaus. Il y aurait fait des enfants. Certains rigolaient en l'imaginant patriarche charentais d'un clan amérindien ; mais pourquoi pas ! Il avait déplacé ses avoirs dans une banque locale qui lui marquait beaucoup de considération, et trafiquait un peu dans les fausses antiquités andines de mèche avec des boutiquiers de la ville habitués au carbone 14. Pour le reste il vivait en autarcie sur un troupeau de cochons noirs que gardait la marmaille. L'aventure terminée en Papouasie, Maïté avait retrouvé son poste à la base navale de Naples et attendait l'âge de sa pension des organisations coordonnées. Elle avait plus de souvenirs que de fortune, mais c'est ce qu'elle avait cherché en suivant John à Malte. Ecrirait-elle ses mémoires ? En attendant elle sortait avec un contre-amiral grec.
Elie Grandchamps était mort à Paris de vieillesse et ses obsèques avait déplacé du monde à N.D. du Liban, du monde pas toujours fréquentable mais qu'importe, la corbeille était pleine à déborder. Restait Monica. Après trois mois de vacances à Chypre que lui avait accordés la Justice papoue, elle avait repris son poste de direction au Jacaranda Resort. Geronimo était toujours à la porte, plus gros et plus fier que jamais. Gilbert, comme elle l'appelait maintenant, venait plus souvent. Ils finiraient bien par s'associer d'une façon ou d'une autre.
Du fils Borossian personne n'avait plus jamais entendu parler. Vengeance digérée ne donne pas d'aigreurs.
Les palmiers encensent mollement le front de mer de Calusa Beach et les oiseaux sont ce soir dans l'air plus nombreux qu'à l'ordinaire. Je vais regarder ce qu'ils disent à la météo. Des fois qu'il me faudrait clouer des planches !
In angelis custodia !